Alors que l’on parle souvent de surabondance de l’information et que l’on cherche des remèdes pour diminuer ou minimiser ce flux d’information, la cartographie peut être un premier élément de réponse.
Sans résoudre le fond du problème – s’il en est vraiment un – la cartographie de l’information dispose de plusieurs atouts face à des stocks et des flux d’information qui sont de plus en plus importants.
Tout d’abord, la cartographie de l’information structure l’information. Qu’il s’agisse de clusteriser l’information pour « découvrir » des groupes de documents, d’objets qui ont des similarités ou bien de construire des arborescences documentaires parfois complexes, sur plusieurs niveaux et parfois imbriquées les unes dans les autres, la cartographie peut apporter un premier niveau de solution.
Mais l’on pourrait dire que sur le fond, ces atouts sont plus liés à du calcul statistique (un des exemples est le text mining pour identifier les thèmes et termes saillants permettant de construire des cluster) ou à l’exploitation des méta données des objets observés, plus qu’à la cartographie elle-même. Ce qui est vrai. Une cartographie repose toujours sur des données et plus ces données sont fiables, plus elles sont structurées et qualifiées, plus les possibilités offertes par la cartographie de cette information seront grandes.
La cartographie comporte toutefois à elle seules différents avantages qui sont liées à la représentation visuelle.
- La spatialisation d’un univers permet d’apporter des dimensions de lectures supérieures, la position de chaque objet par rapport à un autre pouvant être exploitée pour apporter du sens. Certaines solutions cartographiques vont même jusqu’à proposer des modes de représentation en 3 dimension afin de permettre la visualisation simultanée d’un plus grand nombre de variables et des rapports qu’elles entretiennent.
- La visualisation cartographique est impactante. Il est évident que l’adage « un dessin vaut mieux qu’un long discours » a aussi du sens dans un univers professionnel. Facilité de mémorisation, communication, sont des éléments qui permettent de transformer des données en information pour lui qui les reçoit.
- La cartographie peut être interactive et offrir un mode d’exploration des données dynamiques permettant un gain de temps en recalculant des univers informationnnels à partir d’un autre point de vue, à un autre niveau de profondeur.
La cartographie est donc un véritable atout pour ceux qui sont amenés à manipuler des données, de l’information. Pour leur traitement, pour leur exploration et pour leur communication.
Toutefois les atouts de la cartographie ne doivent pas faire oublier ses écueils. La cartographie ne vaut principalement que par l’information qu’elle permet de visualiser. Information totalement non structurée, non cohérente, processus de collecte amont à la cartographie biaisée, algorithmes de spatialisation n’ayant aucun sens sont autant d’erreurs qui peuvent faire de la cartographie un outil contre-productif pouvant même aller jusqu’à déformer l’information.
Afin que la cartographie de l’information soit justement un véritable outil d’entreprise, il est important qu’elle soit traitée sérieusement et non pas comme un simple gadget visuel et que les informations collectées, que les vues cartographiques, soient traitées et réalisées par des personnes qui, à chacune des étapes, comprennent les manipulations qu’elles effectuent et les choix qu’elles réalisent et qu’elles comprennent également l’impact que cela aura sur les cartographies réalisées.
A l’issue de ce processus de construction cartographique, il sera alors possible de lire et d’analyser cette cartographie tout en intégrant les choix réalisés lors du processus de construction et en connaissant de fait les limites de cette cartographie.
Quelles sont les principaux types de cartographie que vous croisez en entreprise et quelles sont les difficultés rencontrées pour les construire ?
Je différencierais d’abord le mind mapping et la cartographie de l’information.
- Le mind mapping est un outil de travail et de visualisation particulièrement efficace mais qui s’éloigne des caractéristiques d’un outil de cartographie de l’information qui pour moi seraient les suivants :
- La cartographie de l’information doit permettre de traiter et de visualiser des volumes importants de données.
- Elle doit permettre également de spatialiser les données automatiquement en fonction des variables de ces données ou des variables découlant des relations entre les objets.
- Elle doit enfin proposer des outils graphiques de visualisation et de différenciation des données (tailles, couleurs, distance).
Les cartographies que je rencontre le plus aujourd’hui en entreprise sont :
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Les cartographies liées au Web et qui permettent de travailler sur des réseaux de sites web et de faciliter l’identification des relations entre les sites autour d’une thématique. Ces cartographies sont particulièrementefficaces car elles adressent deux problèmes évidents de volumétrie (des sites et des pages) et de complexité des interactions. Les principales limites de ce type de cartographies reposent sur l’extraction amont des relations entre les sites
- Les cartographies de réseau humain qui reposent soit sur des données collectées et qualifiées « à la main » soit sur des données collectées automatiquement et qui offrent un angle de vue sur un réseau de personnes (cartographie des mails échangés ou des coups de fils échangés par exemple, cartographie des carnets d’adresse des réseaux sociaux « publics » ou d’entreprise par exemple).
- Les cartographies de « market intelligence » utilisées principalement dans les Directions Intelligence Economique ou Business Intelligence et qui permettent de mapper des relations entre des acteurs économique, des produits, des marchés et de visualiser les tailles respectives de ces acteurs sur leurs marchés. Elles se différencient des cartographies orientées Webs car elles cartographient un univers dont les objets ne sont pas uniformes et peuvent entretenir des relations différentes et plus complexes qu’un simple échange de liens. (Par exemple la société X a pour filiale la société Y qui produit la gamme A1 et A2 de produits pour un volume respectif de 10 000 dans le pays 1 et de 350 000 unités dans le pays 2.) Elles s’en différencient également par la complexité des informations à représenter dans un seul espace : personnes, sociétés, produits, résultats, chiffres d’affaires, parts de marché…
- Les cartographies documentaires qui permettent de visualiser et / ou d’interagir avec des corpus de documents structurés (disposant de méta données et de champs explicites) ou non structurés. Elles peuvent être utilisées en bibliométrie par exemple mais aussi en veille scientifique sur des corpus de brevets.
Mais il existe une infinité d’exploitation de la cartographie. Ce n’est pas aujourd’hui la donnée qui manque et qui mériterait d’être travaillée avec une approche cartographique.
Enfin pour conclure quelques saines lectures ou des pistes de travail sur la cartographie de l’information.
Dans la série éditeurs logiciels :
- Pikko Software qui avec son outil Vision Link Desktop et Serveur permet la représentation de modèles de données entités-relationnels complexes, le tout de façon assez souple.
- Touchgraph, plus pertinent pour traiter des volumes de données plus importants mais moins complexes. Ils se sont fait connaître avec leurs démonstrateurs de mapping des résultats de Google (avec l’exploitation de la commande related) et de son carnet d’adresses Facebook.
- Analyst Notebook, trés prisé des services officiels d’enquêtes et d’investigation. Trés puissant et son rachat récent par IBM devrait lui permettre de se developper. Son seul inconvénient : sa complexité de prise en main et son prix accessoirement.
- Just Map it!, solution de cartographie proposée par Social Computing et qui vient de lancer une solution de cartographie permettant de mapper les flux RSS, et les relations des billets entre eux par l’intermédiaire des tags.
- Et enfin, Gephi ! LE logiciel de cartographie open source. Une communauté relativement active qui développe et partage de nombreux plugins et une solution en constante évolution. Incontournable, un peu ingrat à prendre en main, gratuit. Un reproche en ce qui me concerne à lui faire… : pas possible de mettre des liens cliquable.
J’en ai probablement oublié. Cette liste n’a pas vocation à être exhaustive…#réclamationsinutiles
Dans la série site à lire absolument :
- Infosthetics. Absolument magnifique. Source d’inspiration et de réflexion. Essayer de concilier le joli avec l’utile. En tout cas Infosthetics nous offre de l’imagination et de l’esthétisme. A vous de voir comment appliquer toutes ces belles représentations à votre métier.
- Très bien également, Visual complexity qui recense différents projets de cartographie.
Le blog français sur le sujet : Serial Mapper, tenu par Claude Aschenbrenner. Incontournable
Le livre :
A lire absolument. Et à regarder. Data Flow 2 (et le volume 1 aussi).
Le mot de la fin, pour vous dire que les outils, les algorithmes de cartographie ne sont pas une fin en soi. C’est à vous de savoir ce que vous voulez mapper, de partir d’hypothèses, de vous procurer des données exploitables et ensuite d’y appliquer le spectre de vos connaissances lors de la lecture et de l’analyse des données.
Et accessoirement, si vous avec besoin d’un coup de main, cela fait partie des parties des projets sur lesquels Actulligence Consulting a la chance de travailler depuis plusieurs mois (<= publicité inside. Blogueur mais surtout entrepreneur oblige.)